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Télétravail surveillé… 

Mais tout n’est pas rose dans le monde merveilleux et libéré du télétravail collaboratif. En effet, la méfiance vis-à-vis des collaborateurs est encore bien présente dans beaucoup d’organisations. En conséquence, certains ont recours à plusieurs applications offrant des manières diverses de surveiller le travail des employés à distance et, éventuellement, de leur mettre de la pression : le passage au home office ne doit pas être le prétexte à une baisse du rendement… Une application appelé “Desk Time” permet de faire des captures d’écran des ordinateurs des salariés, ainsi que de voir quelles applications ils utilisent.  

Un autre exemple de ces logiciels de surveillance avec “Sneek” qui donne la possibilité d’avoir un “mur de visages” avec les différents salariés où leur photo sera prise toute les 1 à 5 minutes afin de s’assurer qu’ils sont bien en train de travailler. Les patrons peuvent également les appeler à n’importe quel moment. 

On peut comprendre que les responsables les plus méfiants soient rassurés par ce type de solution mais on peut aussi se demander si c’est bien justifié de déployer un tel arsenal de surveillance… 

L’interface de Sneek 

Autre tendance, le télétravail valorisé 

Heureusement, il n’y a pas que le flicage qui émerge comme tendance en ce moment. Certains éditeurs semblent avoir compris qu’il faut favoriser le lien social même lors du travail à distance et une solution comme Assembly vise précisément cela. 

Avec Assembly, vous pouvez ainsi préserver une ambiance sociale, même quand vos équipes sont toutes à distance. Pour cela, plusieurs fonctionnalités sont disponibles : on peut citer la possibilité de reconnaître vos collègues en attribuant des points et en laissant des commentaires. On peut également souhaiter un anniversaire à l’un de vos collègues avec un message personnalisé. Ou encore la possibilité de créer un “catalogue de récompenses”, avec par exemple un déjeuner avec le CEO, l’accès à un cours en ligne, une soirée pizza en équipe ou encore des cartes cadeaux ! 

Quelque part, on sent bien que ce sont les “réseaux sociaux d’entreprise” qui en profitent pour faire un retour discret mais qui se veut enfin efficace. 

Un exemple d’écran de la solution Assembly.
Un exemple d’écran de la solution Assembly.

Par ailleurs, Assembly est prévu pour s’intégrer avec Slack. Vous avez ainsi la possibilité d’utiliser l’outil, directement au sein de Slack. Cette question de “l’ambiance sociale” au sein des organisations commence à prendre toute son importance au fur et à mesure que le confinement traîne en longueur.  

Malgré les points téléphoniques et les visioconférences, il est parfois difficile de connaître l’état d’esprit réel des salariés durant cette période particulièrement difficile où l’on est privé du feed-back des interactions physiques. Or il est important de soutenir tous ceux qui en ont besoin et qui ne prendront pas forcément l’initiative de contacter leur manager. Certains éditeurs commencent à imaginer différentes solutions pour faire face à ce challenge. Par exemple, sous la forme d’un chatbot (idéalement intégré dans une des plateformes collaboratives déjà citée). Régulièrement quand un collaborateur se connecte à son ordinateur, le chatbot l’interpelle en lui demandant comment ça va et plusieurs smileys apparaissent : 

  • Tout va bien j’ai bon moral
  • Je tiens le coup mais c’est long / dur 
  • Ça ne va pas du tout
  • Pas envie de répondre 

Une case “commentaire” permet également à ceux qui le souhaitent de s’exprimer plus longuement sur leur état d’esprit et demander à être contacté. Chaque jour le management reçoit un récapitulatif de l’humeur de chaque collaborateur, de son évolution dans le temps, les noms de ceux qui souhaitent être contacté et de ceux qui n’en n’ont pas manifesté le désir mais qui ont souvent répondu par les smileys “orange” et “rouge”. Ce type d’outil simple peut aider à repérer des situations qui pourraient se dégrader si rien n’était fait. 

Une méfiance envers le télétravail injustifiée 

En dépit de ses outils utiles, le télétravail suscite toujours une certaine méfiance, surtout en France où la discipline n’est pas toujours notre point fort… Pourtant, quand on regarde nos habitudes de travail réelles, on constate que d’être obligé de se réunir dans un bureau n’est pas forcément positif ni productif. Une étude menée en 2017 par Invitation Digital Ltd (une firme de marketing basée au Royaume-Uni) et qui a porté sur près de 2000 (1989 pour être exact) employés de bureau (à temps plein) âgés de plus de 18 ans et disséminés sur l’ensemble du territoire du Royaume-Uni porte justement sur cette problématique…  

En réponse à la question de savoir s’ils se considèrent productifs tout au long d’une journée de travail, la grande majorité (soit 79 %) avait répondu non. D’après les résultats de l’étude, seul le cinquième (donc les 21 % restants) a répondu par l’affirmative. Le sondage avait ensuite révélé que la durée moyenne de productivité sur le lieu de travail est de 2 h 53 mns, soit moins de trois heures en tout. D’après l’enquête, si les travailleurs se retrouvaient avec moins de trois heures de productivité sur une journée de travail c’est parce qu’ils étaient la plupart du temps distraits par des activités comme : surfer sur les réseaux sociaux – 47 % (des répondants au sondage) ; lire les sites Web d’actualités – 45 % ; discuter des activités en dehors du travail avec des collègues – 38 % ; préparation de boissons chaudes – 31 % ; pauses cigarettes – 28 % ; messagerie texte et messagerie instantanée – 27 % ; manger par petits bouts – 25 % ; faire de la nourriture au bureau – 24 % ; téléphoner à son partenaire/à ses amis – 24 % ; recherche d’un nouvel emploi – 19 %. 

Bien entendu, on peut objecter que, une fois chez soi et loin de ses collègues habituels, les sources de distractions ne vont pas disparaître comme par enchantement (si on est honnête, force est de reconnaître qu’une partie au moins de la liste ci-dessus est commune pour les deux situations) ! 

Cependant; il suffit de connaître le milieu professionnel pour savoir qu’il y a deux catégories d’employés : ceux qui s’efforcent de travailler en dépit des “distractions sociales” et ceux qui s’en délectent…  

D’un management de type “contrôle” à un management de type “leadership” 

La situation actuelle et les expériences qui en découlent pourrait déboucher sur une certaine redéfinition des zones de responsabilités (entre managers et “exécutants”). La collaboration efficace (que ce soit sur site ou à distance) induit une notion de transversalité. Le périmètre de responsabilités des managers change avec l’intensification de la collaboration et la nécessité dans beaucoup d’entreprises de retravailler leur organisation. 

Le télétravail impose une culture du résultat 

La situation actuelle est bien décrite dans l’article de Bertrand Duperrin “Le télétravail impose une culture du résultat” (Source https://www.duperrin.com/2020/05/04/le-teletravail-impose-une-culture-du-resultat/) dont voici les principaux extraits : 

La meilleure manière de s’assurer qu’une chose sera faite, bien faite et dans les délais est de superviser la manière dont elle est faite et son avancement. C’est en quelque sorte le métier historique du contremaître qui a été transposé quasi à l’identique dans la fonction de manager quand l’économie s’est tertiarisée. 

Elle suppose une et une seule chose : un contrôle visuel de la personne et, occasionnellement, la possibilité de lui parler. Ce qui pouvait au départ être un dispositif d’accompagnement sain et efficace pour faire progresser le collaborateur est devenu un simple dispositif de contrôle dont on a oublié la finalité première. 

Au fil du temps de plus en plus de managers ont cessé de vraiment s’occuper du “comment” qui ne redevient une préoccupation que trop tard, c’est-à-dire lorsque les choses vont mal. Ils se sont contentés de vérifier le “quoi” qui revêt deux aspects : 

  1. La personne travaille. 
  2. Le travail est fini. 

Ensuite seulement on se préoccupe de ce qui a vraiment été produit (qualité, conformité avec les attentes, résultats obtenus) et le cas échéant le “comment” si le résultat ne satisfait pas (et encore que certains n’aident même pas leurs collaborateurs à corriger leurs erreurs.) 

Pour dire les choses autrement on contrôle les moyens. Même pas les moyens du collaborateur mais ceux du manager : on s’assure qu’une personne qui doit travailler travaille. Sur quoi ? Comment ? Cela passe après. 

Alors bien sûr cela a entrainé certaines déviances donc une culturellement ancrée en France est celle du présentéisme. L’important c’est d’être là et surtout qu’on voit qu’on est en train de faire quelque chose. Peu importe ce qu’on fait. Si on a fini une tâche importante à 17h45 et qu’on n’a pas le temps d’en recommencer une autre avant 18h et bien on va rester jusqu’à 18h quand même. Et on demande à celui qui part à l’heure, ironiquement, s’il a posé sa journée. Bref tout ce qui ressemble à une preuve d’inefficacité et de mauvaise organisation dans d’autres cultures est valorisé. En attendant cela a généré, selon les époques, d’excellents joueurs de Démineur ou de Candy Crush. 

Mais à distance cela ne fonctionne plus. 

Cependant, une fois qu’on ne voit plus ses collaborateurs ce beau système s’effondre. Sans visuel on ne peut plus voir si à l’expression de son visage une personne a besoin d’aide (et c’est dommage) et on ne peut plus contrôler en permanence ce qu’elle fait. 

De là deux possibilités : 

1°) Augmenter le contrôle et la pression 

Harceler le collaborateur pour lui demander sans cesse, à distance, ce qu’il fait, où elle en est. Cela pose trois problèmes : 

  • Le collaborateur est sans cesse interrompu dans son travail et perd en concentration et en productivité. 
  • Le collaborateur perçoit un manque ou une absence de confiance et se démotive, se désengage. 
  • Le collaborateur se sent harcelé, le stress augmente. 
  • Le manager gaspille une énergie incroyable quitte à se mettre en stress ou en situation d’épuisement tout seul. 

Et tout cela pour un résultat proche du néant. 

On a aussi, avec l’épisode COVID-19, vu exploser la vente de mouchards permettant de contrôler si le collaborateur est devant son écran, quelles fenêtres sont ouvertes, voire ce qu’il tape et où il clique. Certains managers ont même imposé de laisser toujours la caméra allumée et d’être connecté en permanence à une salle de réunion virtuelle. 

Utilité ? Zéro là aussi. 

Mais ne nous méprenons pas : avant même de s’occuper du résultat, la préoccupation première est de savoir si la personne travaille ou en tout cas fait acte de présence devant son ordinateur ! 

Et d’ailleurs pourquoi le travail à distance, distribué entre plusieurs sites d’une même entreprise est-il accepté de longue date et pas le télétravail ? Parce que dans le premier cas si le manager ne surveille pas directement il sait que quelqu’un d’autre le fait. 

2°) Changer son approche du management 

Une seconde approche part d’un tout simple constat : on ne peut contrôler que ce qui est contrôlable. Donc fini le contrôle des moyens et intéressons-nous au résultat. Ou dit autrement, utilisons l’énergie et le temps des managers pour faire des choses qui ont un impact. Après tout klaxonner n’a jamais aidé à résorber un embouteillage. 

Cela n’a rien de neuf, les entreprises qui ont depuis longtemps adopté le télétravail ou qui sont efficaces avec des équipes réparties sur plusieurs sites ont compris que le travail n’était ni un lieu ni même un moment mais une attitude, un état d’esprit et à la fin un résultat. Et ce depuis plus de vingt ans pour certaines. 

Alors bien sûr le manager ne se transforme pas en inspecteur des travaux finis mais la méthode change. 

  • Des attentes fixées clairement, explicitement 
  • Pas une surveillance de tout instant mais des points d’avancement réguliers et prévus d’avance si le collaborateur en a besoin 
  • Être disponible immédiatement si le collaborateur demande de l’aide ou des explications. Là on renverse totalement la relation 
  • N’avoir pour seul juge de paix que le résultat final. Peu importe où et quand il a été produit. 

Un vrai changement de paradigme pour le manager qui doit passer d’une posture de “command & control” à quelque chose qui serait plutôt “lead & help”, ce qu’on appelle également le “servant leadership“. Traumatisant pour certains managers…mais pas seulement pour eux. 

Le télétravail est une lentille grossissante ! 

Les managers qui veulent à tout prix “fliquer” leurs collaborateurs qui travaillent à distance sont “à côté de la plaque” : le télétravail agit en fait comme un révélateur. Celles et ceux qui étaient productifs au bureau le seront encore plus ailleurs, à distance, loin des contraintes paralysantes du “tout le monde au même endroit” (réunion chronophages, interruptions “sociales” constantes, etc.). En revanche, celles et ceux qui étaient performants pour “brasser de l’air” dans le contexte hautement social du bureau vont se retrouver fort dépourvus face à un écran, seul et sans public. C’est en cela que les situations de télétravail sont des révélateurs, des lentilles grossissantes qui permettent de départager les bons éléments productifs des “acteurs qui savent juste faire semblant d’être de bons éléments”. 

Il en est de même pour le management. Celles et ceux qui insistent pour mettre en place ces dispositifs de surveillance sont du même acabit : conscients de leurs faiblesses en matière d’entraînement et de charisme, ils tentent de compenser en jouant les “petits chefs” et se transforment en “surveillants” car ils sont incapables de jouer pleinement leur rôle. 

Conclusion : un processus qui n’en est qu’au début

Bien que les logiciels collaboratifs remontent déjà aux années soixante-dix (comme on l’a vu dans la première partie), on se rend bien compte que leur évolution est loin d’être terminée. On pourrait même dire “au contraire, elle ne fait que débuter !”… En effet, avec l’intensification des échanges à distance que l’on est en train de vivre, on réalise que cet usage à grande échelle était nécessaire pour vraiment toucher du doigt ce qui manque encore à ces plateformes. C’est parce que le télétravail, le e-learning et la vidéoconférence sont désormais enfin utilisés largement que l’on en perçoit tant les bénéfices que les lacunes. 

Les mentalités à la traîne, comme toujours

Mais, bien sûr, tout cela n’est rien en comparaison du changement de mentalité qui accompagne ce processus. On le sait bien, d’habitude les technologies progressent bien plus vite que les mentalités. Sur ce plan, ce qui nous est arrivé est l’équivalent d’un tsunami et fait office d’accélérateur inattendu mais bienvenu. Pour une fois, les managers sont obligés de “prendre le train en marche” que ça leur plaise ou non. Oui, le télétravail fonctionne, le e-learning est un vecteur de formation efficace et la vidéoconférence épargne bien des déplacements inutiles (ou trop coûteux). Pour beaucoup, il s’agit d’une grande surprise, voire d’une sidération totale.

Un mouvement irréversible

Désormais, il est clair que le mouvement est irréversible : ces plateformes vont être de plus en plus utilisées et donc, vont continuer à s’améliorer. Les lacunes encore existantes vont être comblées par de nouveaux intervenants (les acteurs en place vont se dépêcher de recoller au peloton des innovateurs) et le management va finir par s’habituer à cette nouvelle donne. La dimension collaborative du système d’information ne va pas être un gadget qui devait se contenter d’expérimentations temporaires et limitées, elle va devenir indispensable et elle va poser ses propres défis (comme le danger de la “dispersion” des documents).

Qu’on le veuille ou non, qu’on y croit ou pas, le tournant est en cours. C’est comme pour le BYOD il y a plus de dix ans, il n’y aura pas de retour en arrière.

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